« Partage ta joie », tel est le slogan dumois de la mission universelle cette année. Inspiré du récit des disciples d’Emmaüs (Luc 24, 18-35), ce slogan rappelle la joie que ces disciples ont éprouvée en reconnaissant le Ressuscité dans le geste de la fraction du pain. Cette rencontre convertit leur dépression en allégresse pour annoncer Jésus. Des missionnaires de la joie, voilà des témoins dont notre monde fracturé a besoin.
Durant le mois d’octobre les communautés catholiques se mobilisent pour soutenir la mission de l’Église dans les régions défavorisées. Cette solidarité ne se manifeste pas que dans l’aide matérielle mais aussi par la prière.
Les deux disciples, Cléopas et son ami qui ne porte pas de nom – car il représente chacun d’entre nous – sont bouleversés par la mort du Christ. Tristes, profondément déçus et découragés, ils quittent Jérusalem. Ils avaient espéré que Jésus sauverait Israël de l’envahisseur Romain. Pour eux l’aventure de Jésus touche à sa fin. Les rumeurs sur sa résurrection circulaient, mais ces propos leur semblaient si étranges qu’il leur était difficile d’y prêter leur foi.
C’est fini! N’est ce pas ce que certains ressentent en voyant les églises se vider jour après jour?
Pendant que les deux disciples marchent et échangent sur les évènements de Jérusalem, un inconnu les rejoint, marche avec eux et s’invite dans leur conversation. Il semble ne pas être au courant de ce qui s’est passé à Jérusalem. Tristes, ils lui racontent tout sans dissimuler leurs espoirs estompés. L’inconnu les écoute.
Quand il ouvre la bouche, ils sont saisis d’étonnement. Ils découvrent en cet étranger une personne pleine de sagesse, capable d’interpréter les faits de Jérusalem en se basant sur les Écritures. Leur joie d’apprendre que tout ce qui s’était passé suivait le plan de Dieu devient immense. Leur doute cède place au désir ardent de continuer à écouter cet inconnu. Saisis par les Écritures, ils l’invitent à rester avec eux. « Notre coeur ne brûlait-il pas au-dedans de nous, lorsqu’il nous parlait en chemin et nous expliquait les Écritures? », se rappelleront-ils plus tard.
Une fois à table il prend le pain, rend grâces et le rompt devant leurs yeux. Ce geste les renvoie immédiatement au soir de la dernière Cène (Jeudi Saint). Ils reconnaissent le Seigneur, il est vivant. Leur tristesse et leur découragement se transforment en joie et désir ardent d’annoncer cette bonne nouvelle: Jésus est vivant! Tout n’est pas fini!
Ils se remettent en route pour aller partager cette joie avec les disciples enfermés à Jérusalem! Leur joie n’est pas un sentiment passager mais plutôt une joie intérieure profonde qui jaillit de la rencontre avec le Ressuscité et qui leur donne une nouvelle perspective, la perspective missionnaire.
L’ itinéraire missionnaire des disciples d’Emmaüs décrit celui de chacun de nous confronté aux doutes et au découragement. Mais la proximité du Seigneur et sa présence réconfortante et transformante sont plus fortes. Quand notre foi est mise à l’épreuve par les injustices, les guerres, les abus de tous genres, l’incompréhension, ou l’indifférence structurelle à notre misère, la tentation de rompre avec l’Église (Jérusalem) devient plus grande. Il nous arrive de craquer et de penser que tout est fini.
Sur le chemin de la foi, chacun de nous a besoin de ce missionnaire inconnu qui s’approche humblement, s’intéresse à lui, l’écoute et l’aide à relire son histoire, à comprendre ses doutes et ses inquiétudes et lui ouvre les yeux sur la joie de croire. Le moment de déception peut être bénéfique pour réaliser ce dont on a besoin: reconnaître le Seigneur qui marche avec nous pendant les moments d’épreuves et d’incertitudes.
Dans sa méditation sur le récit des disciples d’Emmaüs le Pape François souligne: « le Seigneur ressuscité est proche de ses disciples missionnaires, et il marche à leurs côtés, surtout lorsqu’ils se sentent perdus, découragés, effrayés face au mystère d’iniquité qui les entoure et qui veut les étouffer ». (Message pour le 97e Dimanche des Missions).
Notre monde a besoin d’hommes et de femmes courageux et remplis de cette joie intérieure qui, quoi qu’il arrive, témoignent que Jésus est vivant et qu’il chemine à nos côtés sans que nous nous en rendions toujours compte. C’est lui Jésus qui transforme les chemins de tristesse, de découragement et de désespoir en chemins de vie, d’espérance et de partage. Ne nous dit-il pas au cours chaque messe: « Faites ceci en mémoire de moi! »?
Que ce mois de la mission universelle de l’Église nous aide à redécouvrir cette joie de croire et à la partager, car une joie partagée est une double joie. Partage ta joie : ma mission, ta mission !
P. Théogène Havugimana
Directeur national Missio Belgique